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    Il gelato

     

    En 2008, durant notre voyage dans le Nord de l'Italie, je postais régulièrement des photos sur mon blog de l'époque ("Graines d'espérance") et proposais aux lecteurs d'imaginer des textes inspirés des images.

    Ecrire à partir d'un support visuel (ou sonore !) est un jeu que j'aime proposer dans mes ateliers ; ici, le texte a été co-écrit avec une autre blogueuse, Lady Angel. Elle l'a commencé (partie en italique) et je l'ai poursuivi et fini à partir du point où sa plume s'était arrêtée.

    Ecrire à plusieurs mains est une autre expérience que j'aime tenter, moins facile qu'il n'y paraît car il faut que les deux styles s'harmonisent sans laisser paraître les "jointures" du texte !

    En faisant ma leçon d'italien, hier, j'ai repensé à cette série de photos et eu envie de republier ce texte. Vous pouvez lire ceux de Lady Angel sur son blog de l'époque,"L'écritoire".

     

     

     

    Je me souviens. Il faisait chaud, très chaud. Comme toujours dans les rues de notre village. Maman avait eu un peu plus de temps que d'ordinaire pour venir me chercher à la sortie de l'école. J'étais fou de joie. Je la voyais si peu. Nos horaires ne concordaient pas souvent et si nous courions après le temps, nous courions aussi souvent après nous mêmes.
    Papa devait nous rejoindre après être passé au garage pour faire la révision des 15 000.
    On s'était assis sur le premier banc qui s'était offert à nous. Qu'est ce que je la trouvais jolie ma maman. Jolie comme une friandise.
    Elle s'est levée, a sorti un porte monnaie miteux de son sac et s'est précipitée sur le marchand de glaces qui passait. A la volée, elle m'a demandé quel parfum je souhaitais et après qu'elle m'en eut énuméré une bonne dizaine, elle choisit elle-même devant ma mine dépitée. Le pire restait à venir !
    Elle ouvrit son porte-monnaie et compta son menu butin.... Deux pièces, deux malheureuses pièces se volaient la vedette contre le cuir, mais rien qui suffit à payer sa dette au vendeur. Ca allait fondre. L'homme lui tendit le cornet. Elle bafouilla. Bredouilla que son mari allait la rejoindre, et se confondit en excuses. L'homme sourit, moi pas.
    Maman reprit sa place à mes côtés, confuse et pleine de principes. Face au vendeur, elle n'osait rien faire...
    Et si papa ne venait pas???
    Elle ne me regarda pas et fixa son regard sur le bout de la rue pendant de longues minutes; pendant de trop longues minutes...
    Il faisait si chaud.


    Ils m'attendaient. Mes deux trésors. Ils m'attendaient. Fallait que je speede, que je mette la gomme. Oui mais...
    Pas facile de tracer dans les ruelles étroites du village, avec les touristes agglutinés devant les vitrines qui barraient le passage. Pas facile de me faufiler parmi les attroupements de curieux et de promeneurs qui, eux, pouvaient prendre le temps de vivre.
    Et ces pavés inégaux, ils n'allaient jamais se décider à les aplanir, à goudronner tout ça ? Et ces trottoirs irréguliers, bancals ? Jamais praticables de toute façon, encombrés l'été, glissants l'hiver...
    Ils m'attendaient. J'allais être en retard. Je suais sang et eau sur mes deux roues.
    Pas facile de me frayer un chemin dans cette cohue indifférente.
    Pas facile de traverser une ville pas équipée pour un fauteuil roulant...

    Ils étaient là... au loin.
    Ca valait toute l'eau et tout le sang du monde.
     

     


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