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     Côte à côte (12)

     

    La joie me quitte en hémorragie, je me vide d’elle comme si je m’étais ouvert les veines de l’âme. Je regarde le bleu du ciel, le bleu de la mer. Je ne vois que du noir, je ne vois que des lames. Je m’enfonce dans le sable, j’ai perdu le ciel.

    Je devrais trouver le courage de faire ce qu’il y a à faire, continuer à sourire, jouer mon rôle, assumer le quotidien. Je n’y arrive plus. Je n’ai plus d’envies. Je n’ai plus de forces. Je veux juste me coucher, fermer les yeux, ne plus sentir. M’endormir. Oublier. Effacer ce cul-de-sac d’injustice, d’absurdité, d’absence, de douleur.

    Un jour, peut-être, je trouverai une sortie, une porte. Pour l’heure, je subis l’encerclement des murs. Chaque jour un peu plus hauts. Chaque minute un peu plus serrés. Chaque seconde un peu plus étouffants.

    Je ne sais qui gagnera, leur force d’oppression ou le goût de la vie en moi.

    J’attends.

    Quoi, je n’en sais rien. Un miracle peut-être. S’ils existent...

    Sur la plage, derrière les murs, les touristes se dorent la couenne, indifférents.

    Ainsi vivons-nous, côte à côte, chacun seul, bien seul, dans son cachot de peau, muet de la vérité, bardé de défenses, hermétiquement scellé au plomb dans le cercueil de son pessimisme, protégé de soi, protégé de l’autre, protégé de l’espoir, protégé de la fragile chance d’une vraie rencontre.


     

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